L’Halloween a une signification bien spéciale, puisqu’à l’origine cette fête veut marquer un point de rencontre entre les vivants et les esprits des défunts.
Mon but de départ était de savoir pourquoi la citrouille est devenue le symbole de cette journée bien spéciale. Chemin faisant, j’en suis venu à m’intéresser à une légende irlandaise que je vais tenter de résumer ici. Une histoire digne d’un roman de Charles Dickens, en passant.
La « pièce » de résistance
Jack O’Lantern (jack-à-la-Lanterne) ou Stingy Jack (Jack le Radin) ou Jack the Smith (Jack le Maréchal-Ferrant) était un personnage assez odieux. Ivrogne, pilier de pubs, avare, amateur de mauvais tours, cruel envers ses proches… Assez pour que sa réputation atteigne les Enfers et que le Diable veuille s’approprier son âme.
En l’abordant la première fois, il l’emmène dans un pub lui payer une bière et se transforme en pièce de 6 pence, Jack n’ayant pas de quoi payer. Mais celui-ci s’empare de la pièce et la fourre dans sa poche de chemise près d’une croix, empêchant ainsi le Malin de reprendre sa forme. En échange de sa libération, Jack le somme de le laisser en paix pour 10 ans. Dépité, le Diable accepte.
10 ans plus tard, il retrouve Jack au beau milieu d’un champ. Le voyant, il lui demande de lui cueillir une pomme, prétextant ne pas pouvoir grimper à l’arbre. Pendant que Lucifer s’exécute, l’ivrogne entoure le pommier avec des croix, le piégeant une fois de plus ! «Je te libérerai si tu me laisses tranquille pour l’éternité !», lui lance t-il. Déçu et amer, il accepte et part sans demander son reste.
Échange de mauvais procédés
Puis vint la fin pour Jack O’Lantern. Arrivé dans l’au-delà, Saint-Pierre lui refuse bien sûr l’entrée du Paradis à cause de la vie qu’il a menée. En désespoir de cause, il se dirige vers l’Enfer. Mais le Diable, lui rappelant son chantage, lui interdit aussi l’entrée de son domaine.
«Que vais-je faire ?», lui demande t-il, désemparé. Et le Malin lui répond simplement: «Retourne d’où tu viens». Mais le chemin est trop sombre, et Jack se voit contraint de lui demander de l’aide. Finalement, Lucifer lui laisse quelques charbons ardents que l’ivrogne dépose dans un navet évidé qu’il gardait sur lui pour la faim.
Et c’est ainsi que Jack O’Lantern erre d’une dimension à l’autre, avec son seul navet illuminé à la main pour s’éclairer.
Évolution potagère
Cette vieille légende était d’autant plus appropriée que notre vieux Jack est mort justement le jour de l’Halloween… ou encore de la fête de Samain. C’était un ancien rituel d’origine celtique où les druides célébraient la fin de l’été et le début de l’automne.
On dit que les vivants et les esprits des morts se rencontraient ce jour-là. En fait, il ne s’agissait ni plus ni moins que de la version celtique du Jour de l’An. Cette fête a évolué à travers le temps pour aboutir à la fête que l’on connaît maintenant.
Mais le navet dans tout ça ? Eh bien, les premiers immigrants irlandais chassés de leur pays par la famine ont poursuivi la tradition… à un détail près.
Trouvant des citrouilles sur leur terre d’accueil, ils constatèrent que ce fruit était beaucoup plus facile à évider et à sculpter qu’un navet, et que sa forme pouvait rappeler un visage humain. Cela leur donnait libre cours pour accentuer l’aspect effrayant ou grotesque de ces lanternes.
Restez branchés !
Il y aurait encore bien des choses à dire sur cette légende de Jack O’Lantern. Notamment sur le fait qu’elle a été reprise et adaptée à divers endroits en Amérique du Nord. Le personnage intervient aussi parfois comme « deus ex-machina », faisant dévier le destin des autres personnages et changeant le cours de l’histoire.
Mais pour ça, j’ai décidé de vous faire attendre un peu jusqu’à la semaine prochaine. Je vous résumerai un conte se déroulant au Québec, et où Jack se montre plus retors qu’il ne l’était de son vivant.
Bon automne, et profitez bien des couleurs !
Journaliste et mélomane, Gilles Tremblay s’intéresse aux humains d’exception et à leurs travers. Il en parle sur Temps Libre avec beaucoup d’enthousiasme et de passion.