Pour célébrer cette glorieuse semaine dans la plus pure tradition québécoise, chicanons-nous au sujet de la poutine.
Il y a plusieurs débats qui font rage depuis des années au Québec au sujet de notre recette nationale. D’abord, qui l’a inventée ? Drummondville ou Warwick ? Puis, il y a la composition de ce fameux met. Parce qu’il y a des règles non-écrites, à ce qu’il paraît. Et finalement, il y a LA meilleure. Qui la fait ? Est-ce que c’est vraiment si subjectif qu’on pense ? C’est ce qu’on va voir.
L’invention de la poutine
D’abord, trouvons qui a superposé les frites, la sauce brune et le fromage. C’est quand même étonnant que les Belges n’y aient pas pensé en premier, avec toutes leurs délicieuses frites et leurs 1001 sauces. Sinon, ça aurait pu être inventé par les Américains. Ils ont bien une frite sauce, mais ça manque de fromage. Les Britanniques ont aussi les chips and cheese, mais ça manque de sauce. C’est donc vraiment au Québec que ce met affreux, mais ô combien délicieux est né. C’est ici que cette catastrophe pour le foie et pour la réputation gastronomique a vu le jour. Mais où ?
Plusieurs villages se sont proclamés inventeurs de cette histoire de frites. Nicolet, Saint-Hyacinthe et Princeville, entre autres, pourraient bien avoir combiné les ingrédients les premiers. Mais les deux plus probables et qui font de cette invention de la poutine un véritable duel sont Drummondville et Warwick.
Beaucoup de Québécois m’ont dit que c’est Le Roy Jucep qui en serait l’inventeur depuis 1964 et qu’il a même le brevet pour le prouver. Mais mes amis de Victoriaville, grands connaisseurs de fromage en crottes, ont l’air de croire que c’est Le Lutin qui rit qui aurait « mélangé les casseaux » en premier, à la demande d’un certain Eddy Lainesse. On ne saura probablement jamais qui dit vrai.
D’autant plus que ce que les gens appellent communément des plotes en Mauricie s’appellent aussi « poutine ». Ces boules de pâte et de viande hachée cuites dans la sauce à ragoût s’apparentent à la poutine râpée acadienne. Si ça se trouve, ce met portait le nom avant la poutine québécoise.
On peut au moins s’entendre sur la recette, non ?
La vraie recette d’une poutine, c’est frites, sauce brune et fromage en grains qui fait « squick-squick ». En théorie, personne ne démentira ça. Mais quand la sauce barbecue est bonne, c’est quand même une sacrée bonne poutine. Et si on préfère notre fromage râpé, qui va nous renoter ?
Récemment, avec la poutine week, on voit toutes sortes de choses se faire appeler poutine. On voit même des montagnes de patates recouvertes de viande, de légumes et de cubes de fromage se faire appeler poutine.
Est-ce que c’est une vraie poutine pour autant ?
Dans la Baie-des-Chaleurs, dès qu’une poutine contient du poulet, elle devient une galvaude. Une mauvaise galvaude en fait, parce qu’une vraie galvaude contient aussi des pois. À Gaspé, si on ajoute du poulet, de la salade de chou et des petits pois à une poutine, elle devient un « chou-chou ».
En sachant cela, vous ne viendrez pas me dire qu’on peut ajouter des pépites de poulet, du rosbif, de la luzerne et je ne sais quoi d’autre impunément ? Oui ? Ça s’appelle encore des poutines parce que c’est délicieux ? Ok, si vous voulez.
La meilleure poutine
Nous avons demandé à nos proches ce qu’était la meilleure poutine de la province. Après avoir éliminé de visu des réponses grotesques comme « La poutine, c’est pas bon »…
…nous avons compilé les suggestions suivantes :
- Poutine homardine de La Maison du Pêcheur à Percé (avec un petit verre de blanc)
- Roy Jucep à Drummondville (selon Sophie, mais Louis-Charles crie « NON! » et nous envoie à Warwick)
- Taverne F à Montréal
- Ma poule mouillée à Montréal
- Pot de vin à Québec
- O’ chevreuil sur la Wellington à Sherbrooke
- Chez Jo-Ann à Gaspé (Le secret de la sauce BBQ est impénétrable)
- La Caillette à Maskinongé
- La Banquise sur Rachel à Montréal
- Les suggestions de Capitaine Montréal
- Dixie Lee à Chandler
- Que sera sera à Québec
- Frites alors! (elles sont toutes bonnes, la limonade maison aussi)
- Chez Claudette à Montréal
- Cantine Hurteau de Sorel
- Chez Grégoire à Ste-Martine
- Casse-croûte Marcotte à Ste-Catherine de la Jacques-Cartier
- Poutine italienne (sauce bolognaise) maison
- Brise-Bise à Gaspé (la poutine aux crevettes est légendaire, parait-il)
- Toutes les cantines de la 132, de Rimouski à Rivière-au-Renard
- La Belle Province, classique et délicieuse
- Le Curb
- Les suggestions rocambolesques de La poutine week
Une question de timing
Les petits nouveaux se demandent peut-être à quel moment on voudrait manger un tel amas de patates et de gras ? Eh bien sachez que c’est déconseillé comme repas du midi, surtout si on a l’intention de travailler par la suite. C’est aussi déconseillé si vous essayez de perdre du poids. Comme ma grand-mère disait, on en mange seulement le dimanche, sinon ça tombe sur les hanches.
Par contre, elle est parfaite pour soulager les peines d’amour et pour éponger l’alcool à 3h du matin. C’est presque médicinal finalement, n’en déplaise au Pharmachien. Remarquez que ça aussi, c’est discutable, parce qu’Yvon, mon propriétaire de bar préféré, dit que pour se remettre d’une soirée trop arrosée, rien ne vaut un hamburger à la moutarde.
Dame Anne vit dans une brume où se côtoient amitiés, boissons, gâteaux et oeuvres d’art.