En 1984, le héros solitaire devait combattre les Russes, les Allemands ou la mafia pour se tirer d’un mauvais pas. En 2024, il devrait mourir, pour le bien de tous.
Tous ceux qui ont étudié l’histoire, le cinéma ou l’histoire du cinéma le savent : les bonnes oeuvres de fiction ont toujours suivi des tendances de leur époque. Parfois c’était volontaire et flagrant, comme quand Rocky a dû battre le méchant Russe. D’autres fois, c’était un banquier hypocrite, dans un éclairage tamisé, qui tirait les ficelles et démontrait l’influence des plus riches.
Généralement, les gentils s’en sortaient à l’époque en faisant preuve de créativité. Il fallait avoir l’oeil et savoir saisir les opportunités afin de sauver la situation et devenir un héros que tous les enfants admiraient.
Dernièrement, une autre tendance semble se concrétiser. Et c’est glauque.
*La suite contient des IMMENSES spoilers pour Umbrella Academy et The Good Place, soyez prévenus*
Umbrella Academy : la saison finale
Je viens de finir la dernière saison d’Umbrella Academy. Pour votre information, je suis une grande fan de la série. J’adore Klaus et ses Klauseries. J’adore Five et son attitude de vieux dans un corps d’ado. J’aime aussi Allison, Ben, Luther, Diego et les autres. J’aime un peu moins Viktor parce que j’ai l’impression que Vanya a été cavalièrement remplacée par Elliot Page, un peu comme quand la copine de Marty MacFly a changé de visage sans prévenir, mais bon. Malgré les transitions bâclées dans des scénarios semi-ficelés, je les aime tous quand même.
Contrairement à d’autres fans, j’ai beaucoup aimé l’angle du métro et l’idylle de Five et Lila. Tout au long de sa relation avec Diego, on a senti qu’elle trouvait que copier son pouvoir était peu satisfaisant. Elle le dit, d’ailleurs, pendant un combat de la saison 3. Et en cas d’urgence, elle va bien plus souvent imiter le pouvoir de Five ou de Vanya/Viktor que celui de Diego. Parce qu’ils sont puissants. Five est intelligent, il les sort toujours du pétrin et il a passé six ans avec elle dans un endroit clos. Je pense que leur aventure était inévitable et je trouve que ça a été bien illustré avec l’aide des Tragically Hips.
J’aurais voulu voir Sloane. Je me suis attachée. Elle était gentille et sincère, c’était un baume sur la famille Hargreeves et elle apportait un équilibre à la présence d’un très désagréable Ben. C’est tellement bizarre que la troisième saison ait tourné presqu’entièrement autour de son amour pour Luther et qu’on ne l’ait pas du tout revue. Pire encore, on dirait qu’il l’a complètement oubliée.
Allison, Luther et Diego, aussi, ont été sous-utilisés. Je suppose que la saison devait boucler toutes les boucles sans le soutien du comic qui est loin d’être terminé. Ça se voit. Je dirais même que ça se voit autant que ça se voyait à la fin de Game of Thrones, même si ce n’est pas très gentil.
L’épisode final de la saison 4
Qu’est-ce qu’on fait quand on ne sait pas comment finir une série? On termine leur projet. Mais quand le projet est de sauver le monde, qu’on s’est embourbé dans une quantité infinie d’univers parallèles et que les personnages ont des pouvoirs, ce n’est pas évident.
« Suicidons-les », s’est dit la personne en charge de résoudre ce problème, « c’est pour le bien commun ». Et ils se suicidèrent tous en se tenant la main et en larmoyant. Comme c’est original.
The Good Place venait de faire la même chose. Après avoir découvert les plans diaboliques de l’enfer, nos copains morts étaient arrivés au paradis, s’y ennuyaient à mourir parce que les créateurs avaient manqué d’imagination (dans la série, comme dans la vie) et choisissaient le doux soulagement de la non-existence.
Ça pourrait être intéressant si le monde réel ne dévoilait pas l’aide médicale à mourir en grandes pompes pour régler le problème du vieillissement des boomers dans un monde où on nous promet apocalypse environnementale et chaos sociétal. Était-ce si dur, de nous laisser des héros de fiction qui sauvent le monde pour nous donner une petite pause et nous faire rêver un peu?
Oui?
Ah bon.
Dame Anne vit dans une brume où se côtoient amitiés, boissons, gâteaux et oeuvres d’art.